Une belle journée en bonne compagnie pour enchainer une super combinaison: la Panthère Rose de la fameuse Dalle à Bornet, Faya Burn, puis Chaos à la face est du Scex du Léman.
C’est après un été bien rempli de balades alpestres que Didier et moi trouvons enfin une date pour planifier une journée de grimpe. Après avoir fait le 3X3 du grimpeur pour jouir des meilleurs conditions, je propose une voie à Didier qui n’en est pas à son coup d’essai et me répond comme souvent « celle-là je l’ai déjà faite… ». Alors je me replonge dans les topos et rêve à nouveau de tous les itinéraires encore non parcourus, pourtant si proche de la maison.
Je propose alors à Didier la Panthère Rose de la Dalle à Bornet et là-encore sa réponse est la même. Cependant, il m’explique qu’il garde un souvenir cuisant de certaines longueurs et que ce sera l’occasion parfaite pour tenter de la grimper avec plus de légèreté!
En effet, comme le disait notre cher Patrick Edlinger:
Ce qui est le plus important d’après moi aussi en escalade c’est quand même la façon dont tu passes. Le but c’est pas de passer un passage crispé sur des prises de se tirer, ça n’a aucun intérêt si tu veux. L’intérêt c’est justement d’essayer d’être le plus esthétique le plus harmonieux possible. En fait c’est une expression corporelle au même titre que la danse ; sauf que la chorégraphie est dictée par les prises : c’est l’opéra vertical.
Patrick Edlinger, La Vie au bout des doigts (1983).
C’est notamment cette longueur qui a motivé Didier à revenir. Mission accomplie pour lui qui a grimpé cette longueur comme une plume dans un thermique. Et c’est là que la magie de l’escalade opère ou pas… Des fois rien ne va, on a l’impression de faire tous les mouvements à l’envers, d’être main droite sur la prise main gauche, ou encore « d’avoir la remorque qui tire au cul » expression qui désigne le fait de se sentir très lourd et de sentir très fort la gravité.
A cela on rajoute souvent une sensation de glisse sous les pieds et une puissante peur de tomber. Des fois c’est tout l’inverse, les mouvements s’enchainent sans hésitation sur un fond de musique classique comme si l’on avait déjà grimpé 15 fois la voie. Les prises sont simplement effleurées et non plus broyées. On saute alors les points sans s’en apercevoir. Lorsqu’on arrive au relai, les chaussons d’escalades se sont transformés en ballerines et un tutu rose a remplacé le baudrier…
Une pause s’impose à la cabane du secteur Bouddha. Un verre d’eau, un sandwich comme dirait Patrick et c’est reparti pour « Faya Burn » avec 2 longueurs magnifiques, du granit très compact, un super grain et des prises juste où il faut. Un petit passage en corde courte nous mène à la forêt. Le chemin du retour passe au pied du Scex du Léman, une falaise que j’apprécie tout particulièrement pour la beauté et le caractère de ses voies ainsi que sa tranquillité. La tentation est trop grande, je propose à Didier de continuer l’escalade. Après un court moment d’hésitation parce que nous avons tous les deux déjà mal aux pieds, nous voila repartis dans la voie « Chaos » en face est du Sex du Léman.
Cette 3ème voie est beaucoup moins parcourue que les 2 premières. Les croquis sur certains topos sont un peu approximatifs. Voici quelques infos pour vous aiguiller.
- La première longueur peut se faire en une grande longueur de 50m pile-poil jusqu’à une grande vire confortable. Ce qui donne 50 m d’escalade en 6a+ raide et variée sur bonnes prises. Les points sont très proches, il est donc préférable de ne pas tous les clipper pour limiter le tirage et les dégaines. On peut aussi couper la longueur sur un relai à 20m ou à 40m (peu confortable).
- La deuxième longueur est un dièdre avec une large fissure au fond. Le relai se fait sur 2 points à relier à coté de la fissure.
- La troisième longueur de « Chaos » part en traversée sur la gauche pour rejoindre une dalle.
- S’en suivra une dernière longueur dans la végétation pour rejoindre la forêt.
- Depuis R2, si la tentation de grimper cette fissure jusqu’au bout est trop grande, alors continuer tout droit dans « il avait dans le coeur » par un laminoir, plus impressionnant que difficile (6b). Relai à la sortie du raide ou sur un arbre.
- La dernière longueur part vers la droite sur une vire encombrée d’un tronc d’arbre mort pour rejoindre des spits.
Les dernières longueurs de « Chaos » et « Il avait dans le coeur » ne sont pas les plus belles, terre et mousse sont au rendez-vous. Elles permettent en revanche de redescendre à pied à Van d’en Bas en passant par Grand-Tête, puis par le joli chemin des Gorges du Daillet que l’on rejoint sur la gauche juste après la deuxième galerie (la partie haute des gorges est fermée en ce moment).
Préférerez le topo des Carnets d’escalade pour les 2 premières voies et le topo de D. Jacquemettaz pour « Chaos ».
La sensation du tutu et des ballerines évoquée précédemment est pour moi l’une des sensation les plus grisante en escalade. Un autre sentiment tout aussi agréable est d’avoir gagné la confiance de mon partenaire de cordée pour l’aider à atteindre cette sensation.