Le Salève, ce dos d’âne dolomitique fermant le bassin genevois à son sud. Une petite montagne qui a tant d’histoires à raconter. Une école aux déplacements verticaux qui, depuis des décennies attire tout en chacun. Une partie des “grands” noms de la montagne auront goûté au calcaire lustré de certaine voie classique. Y grimper garantit l’intensité dans l’apprentissage de l’escalade.
Transcrire des lignes sur ce morceau d’histoire alpine, est loin d’être de toutes aisances. D’avance je tiens à m’excuser si ; Je relate quelques anecdotes qui seraient pas totalement dans la réalité historique ou chronologique. Quelques unes de ces dernières relèvent bientôt de la légende ! Je tiens aussi à m’excuser, si toi, mon lecteur, tu ne te retrouves pas dans ces bafouilles. Il est probable que je n’aie accès à l’entièreté des renseignements historiques. Finalement, je tiens à préciser que je retrace, volontairement, qu’une infime partie de l’histoire de ce massif.

Pour permettre d’enchaîner agréablement la lecture, je diviserai les récits en 4 ou 5 longueurs d’une dizaine année ou communément parlant, en épisodes.
L’intérêt de ces lignes résident dans le fait que beaucoup de gens ne connaissent pas l’aspect historique de ce lieu magique ! En voici quelques bribes aux couleurs de récits, d’images, de potins ou de vidéos. Prenez du plaisirs à (re)découvrir une partie de l’histoire du Salève.
Je suis tombé dans ce milieu, j’avais 13 ans. Je commençais à grimper, c’était en 1983. Tous les soirs d’été, au refuge du parking, la terrasse était pleine d’escaladeur, grimpeur ou varappeur. Les croiser du regard et entendre leurs récits, de façons répétitives, m’aura projeté dans ce monde dont je rêvais. Depuis j’ai écouté, grimpé, partagé ou encore voyagé avec un grand nombre d’entre eux.
Le verbe varapper n’est-il pas né au Salève ! La biographie alpine de la “plus belle montagne du monde” commence vers le milieu du 19ème siècle. Ces lignes ci dessous reprennent qu’une petite partie de celle-ci :
L’avènement de l’escalade libre, le rôle réel de laboratoire de la pratique et de son évolution. Avec en prime, quelques anecdotes de cette période.

1956 : L’utilisation des (premiers) pitons à expansion. La réalisation du Grand Pilier Jaune, dernier problème du Salève… Deux membres du célèbre club de montagne, l’Androsace remontent cette ligne à gauche de la face ouest. R.Wohlschlag (18 ans) et R.Habersaat (25 ans). Ils bivouaquent à 75 mètres sol sur escarpolette. Nous sommes le samedi 2 juin. Le dimanche en fin de journée ils sortiront de cette ligne. Forcée à coup “d’expans” ils bousculent ce monde et ses règles. Guido Tonella, journaliste et chroniqueur alpin de l’époque ira jusqu’à interroger Walter Bonatti, Hermann Bühl ou encore Riccardo Cassin sur l’arrivée de ce genre de protections expansées… Le collège des “grands” sera unanime : …” Ce style de protection n’a aucune place dans l’alpinisme.”… Seul Gaston Rébuffat aura des propos positifs et visionnaires sur ce matériel progressiste !

Les années 50 apportent du sang neuf dans les parois du Coin. Porté par un meneur trop rapidement partit, Eric Gauchat. Suivit de près par Marcel Bron, les frêres Asper, Italo Gamboni, Michel Vaucher et sans oublier l’ainé du groupe ; Raymond Lambert. Voici une fine équipe qui ouvrira les horizons des grandes voies en face ouest. Si vous allez dans la “Sortie Gauchat”, dans la traversée ascendante, pensez bien aux ouvreurs et premiers répétiteurs en grosses chaussures, encordés à la taille ! Ça de quoi vous glacer le dos !

Mise à part l’ouverture du Grand Pilier jaune en 1956, toutes les nouvelles voies importantes dans la face ouest, se feront des années impaires !
1953 : Claude Asper et Marcel Bron ouvrent la célébrissime face Ouest. A grand renfort de coin de bois, de longues sections engagées, cet itinéraire forgera la réputation de LA face. En remontant ces longueurs d’anthologies, imaginez-vous en précurseur encordé à la taille ou encore, pensez à Michel Vaucher en solo intégrale quelques années plus tard !
1953 : Le Grand Dièdre commencé en 1938…, sera terminé cette année par Claude Asper et Marcel Bron. Une escalade ancestrale ! Un combat de rue pour beaucoup de grimpeurs en chaussons et collant fluo. Un voyage dans l’histoire du savoir faire des “anciens” 🙂 Certainement une des premières longueurs du Coin à cotation évolutive… De 5c à 6b selon votre savoir faire !
1955 : Eric Gauchat et Roger Habersaat trouvent la “faiblesse” de la sortie à gauche de la face Ouest. La “Gauchat” voit le jour. Actuellement, ces longueurs valent 6b et 6a engagés. La performance de l’époque est géniale. Eric Gauchat aurait certainement été un porte drapeau de cette génération grimpante si il avait prit le temps de vivre plus longuement !
1957 : La Brown en référence à la célèbre renfougne en face ouest de l’Aiguille de Blaitière, est ouverte par Michel Vaucher et Robert Wolschlag (Pelle-Brosse). Cet hommage à l’accouchement est répété que de façons épisodique. Depuis la disparition des coins de bois, il est mal aisé de confondre roche et bois en bonnes prises de pied…
Une partie de cette brochette de grimpeurs d’exception font partie du GAO ou du club de l’Androsace. Ces deux “club” réunissent les forces alpines du bassin genevois. A leurs façons, ils marquent au fer rouge ou à coup de tricounis, une période phare de l’alpinisme genevois. Jean-Jacques Asper sera le premier homme à entrer dans la combe ouest de l’Everest en 1952…
Prochain épisode, les années 1960 à 1970, avec quelques anecdotes supplémentaires.