Depuis 2002, je voulais trouver une belle équipe pour retourner au Denali. Le Denali, se trouve en Alaska au nord-est d’Anchorage. Une destination unique et exceptionnelle. Il vous faudra lire le récit écrit en 2001 lors de mon premier essai sur ce géant. » Denali entre l’enfer et le paradis blanc » En réalité, cette bosse me hantait depuis 7 ans. Il me fallait pousser à nouveau la fantaisie dans ce coin froid et splendide de cette terre. Une belle équipe est formée en décembre 2008. Nous serons 8 composé de 3 cordées séparées et autonomes.
Arrivée au camp 3 pour Philippe, Yann et leurs clients.
Le matériel réunit, celui des grands froids ( -40° ) et de l’autonomie complète, nous partons le 7 mai 2009 vers l’Alaska. Puis l’accélération des situations s’enchaîne. Un jour à Anchorage, un de plus à Talkeetna et un vol sur le glacier ! Début bien prometteur et pas vraiment en douceur… Partis le 7 mai, nous sommes le 10 mai au camp 1 et dans
La nuit nous demandera entre un et trois levés entre 1h00 et 4h00 du matin, pour dégager les tentes d’une neige bien ventée. Les deux premiers jours se passeront dans le vent continuel ! La montée au camp 3 nous permet de saluer éole et de retrouver une chaleur prometteuse… Elle ne fût que trop courte ! jour de repos au C3, jour de fondue et jour de portage au C4 en guise d’acclimatation.
Camp 4 ou camp des médecins
L’enfer blanc nous offre sa dose le paradis blanc ! Quel plaisirs de me retrouver dans cette ambiance et partageant cela avec mes amis. A chaque arrivée au camp, le 1, 2, 3 et 4 nous avons du monter les murs puis organiser les emplacements des tentes. Nous sommes devenus de grands constructeurs au fil des jours. Digne des plus grands entrepreneurs ! A coup de scie à neige et de pelle métallique ! Les problèmes de réchauds on agrémentés tranquillement les soirées et journées de certain d’entre nous. La découverte des repas lyophilisés ont eux, intrigués bien des papilles gustatives ! Pour ma pars, le « Crumble aux fruits rouge » et les « Lasagnes » furent les plus agréables à manger.
Didier et Bernard sur l’arête entre le camp 4 et camp 5 ( 5000 mètres )
Le 16 mai, nous sommes installés au C4, le camp des médecins à 4300 mètres. La météo n’est pas mauvaise. Le froid est correcte, environs -25° sans trop de vent. Le 17 un passage à 5300 mètres avant 2 jours de repos prévus, histoire de compléter l’acclimatation des troupes. Seulement voilà, le 18 au matin, la météo nous annonce encore 36 heures de clémence, avant un déchainement de températures basses et de vent !
Longue entrevue entre l’équipe, pour choisir un départ à 13h30 le 18 ! Pas de repos, pas de préparation psychique, juste faire les sacs, et prévoir un maximum à boire et à grignoter ! Puis un essai en « one push » vers le sommet 1800 mètres plus haut. Une très
« Footballfield » 6000 mètres à 23h00, loin du monde….
L’avantage est certain, nous n’avons pas eu le temps de nous monter la pression et de choisir le quand, ou et comment pour aller au sommet ! On y va ! Le deuxième avantage est que nous croisons les autres cordées, mais aucune en même temps que nous ! Nous serons le 19 mai 2009 à 01h15 du matin au sommet du toit de l’Amérique du Nord ! Je pense qu’il devait faire environs -35° sans trop de vent. Le retour nous à pris 6h00 ! Le total pousse la sortie à 17h00 de déplacement, entre 4300 et 6193 mètre avec une certaine distance ! Le couché de soleil perpétuel entre 23h30 et 4 h00 du matin est un instant unique dans ces hauteurs d’alaska !
Puis de retour vers le C4, nous nous reposons une petite journée, avant de fuir la montagne. Le 21 mai nous volons le soir depuis le camp de base, jusqu’à Talkeetna. Le 22 les nuages se referment sur le Denali, il neige et l’annonce d’un -40° avec 60 kmh de vent à 4300 mètres nous confirmes l’excellent choix suite aux conseils de notre routeur météorologique !
Un Denali avalé en moins de 3 semaines depuis Genève. Une magnifique expérience partagée avec une superbe équipe !
Bernard, Xavier et Didier au sommet du Denali ou du Mac-Kinley le 19 mai à 1h00 du matin / – 30°
Entre l’enfer et le paradis Blanc / Texte d’après mon voyage en 2001
Talkeetna ce nom de village fait rêver, le bout d’un monde n’est donc pas si loin.
Doug Geeting , ancien du Vietnam, nous reçoit dans son hangar, il y traîne un avion, des sacs d’expédition, des bouteilles de Gatorade, des vieux skis et surtout une douce ambiance de découverte. Bruno, Nicolas, Philippe et Charlotte, mes amis de voyage, sont occupés à refaire leurs sacs ou à solidifier notre système de traction pour les pulkas. Satanées pulkas que nous haïrons au plus profond de nos tripes d’ici quelques jours !
Feu vert, le beau temps est de la partie, les vols et déposes sur le glacier ont lieu. Nous embarquons matériel et hommes dans deux avions différents. Chacun doit avoir son duvet avec lui, au cas où il y aurait un souci technique en vol… Les ours nous préfèrent-ils avec des plumes ?
45 minutes de vol, pour découvrir LE massif du Kinley !
Aucuns mots ne sortent de ma bouche, elle est grande ouverte, à la recherche d’un oxygène me permettant d’intégrer ce que je découvre !
On m’avait dit :
– « Tu verras, il n’y a rien de pareil».
C’est pire que cela, c’est d’une ampleur diabolique, cela vous prend au ventre, aucun être humain ne pourrait rester de marbre devant un tel spectacle.
Je n’ai jamais vu d’aussi belles régions montagneuses, c’est tout simplement la limite divine entre l’enfer et le paradis blanc.
L’avion nous dépose au camp de base (env. 2400 m.) De ce point, nous devons rejoindre le camp 4 (4300 m.) à ski en tirant les pulkas, durant 4 à 5 jours. La météo est toujours avec nous et les gros froids annoncés par des précédents ascensionnistes, ne se pointent toujours pas. Il fait même trop chaud. J’ai marché 4 jours en collant et sous vêtement capilène, sans plus. Le soir, dès que le soleil joue à cache-cache, la température flirt avec les – 25° ce qui nous oblige à ressembler presque à si méprendre, à la pub d’une célèbre marque de pneu…
Depuis le camp 3 (3300 m.), nous réalisons un portage au camp 4 en guise d’acclimatation. Cela fait 4 jours que nous évoluons dans ce monde blanc. Mes plus beaux moments sont rythmés par la marche lente imposée par nos pulkas, ce sur ces pleines immenses immaculées d’une blancheur de banque Suisse.., le tout accompagné par la voix de Loreena Mc Kenith, baladeur aidant.
Le camp 4 est, à mes yeux, le camp de base. Plusieurs expéditions y séjournent durant 2 semaines au minimum. Il se trouve sur un plateau glaciaire, avec une vue indéfinissable sur les sommets avoisinants, le Foraker et le Hunter, pour ne citer que les géants.
Murs de neige, re-murs de neige pour protéger nos tentes d’un vent encore inexistant, installation d’une cuisine de fortune, nous nous improvisons entre le sculpteur sur neige, l’architecte et le maçon, pour réaliser notre camp.
Les jours qui suivent alternent les moments d’acclimatation et de repos. Le temps reste toujours aussi stable. Les matins sont frais, en général, il fait moins 30° vers 9h00, avant l’arrivée de l’astre.
La suite de l’ascension est plus compliquée, elle demande une connaissance alpine. Marche en crampons, utilisation de jumar sur les cordes fixes, et parcours d’arête vers 5200 mètres. Une vraie ascension, avec l’ampleur du coin !
Message météo : encore trois belles journées, puis la galère pour une semaine !
La perspective de rester au lit 20 heures sur 24 à cause de la neige et du froid, ne nous motive absolument pas ! Donc, repos et tentative, puis retour vers le camp de base, afin de pouvoir voler avant d’êtres bloqués. Rétrospectivement, je pense que notre idée a été très bonne, nous y serions encore…
Nous partons vers 4 heures du matin, Bruno, Nicolas, Philippe et moi. Il fait froid mais sec, l’ambiance est polaire, la neige grince à chaque pas, le froid fige nos regards. Notre sang, se bat pour arriver vers nos 20 doigts. Il fait moins 40˚ ! Emmitouflés dans nos habits en duvets, nous nous dirigeons vers les cordes fixes. Au sommet de celles-ci, les duvets tombent, la crème solaire dégelle, enfin nous profitons du soleil.
La suite de cette magnifique ascension se déroule le long d’une arête mixte. Les passages ne sont jamais difficiles, mais demande un peu de savoir faire.
5200 mètres, l’emplacement du camp 5. Un petit plateau, dans une cuvette qui accueille, à bras ouvert, le froid ! – 50° la nuit passée ! Nous y arrivons vers 10h00, le soleil est déjà là, il a chassé les températures négatives. Une pose, une gourde, un mars et ça repart, pour 10 mètres ! Philippe tire sur ma corde, je me tourne et découvre un visage marqué, il est très fatigué et fais mine de ne pas vouloir aller plus haut. Re-pose, re-discution et re-motivation,
« Eh mon gars, tu es venu en Alaska, pour ce sommet, donne-toi les moyens d’y monter ! » .
Vingt minutes, plus tard, notre cordé redémarre. Une longue traversée vers la gauche, avec 400 mètres de dénivelé nous emporte vers le Denali pass à 5650 m. Nous avons mis trois heures et demie depuis le camp 5 pour arriver au col. Philippe me confirme son état de fatigue, il prend conscience du reste du chemin à parcourir et surtout n’oublie pas ma phrase ;
« Tous les mètres que tu montes, tu devras les descendre, tu es seul à connaître ton état physique ! ».
Le Mc Kinley s’arrête ici, pour nous. Philippe ne se sent pas apte à réaliser encore une dizaine d’heures d’effort.
Mon regard se tourne vers des cordées, celles qui progressent 50 mètres au-dessus de nous. Une profonde déception parcours mes veines, soudain je réalise à quel point ce sommet est un rêve ! Il s’éloigne, avec dans mes yeux, une douce vision floue et dans mes pensées une certitude… Je reviendrai.
Windy Coner passage obligé de l’ascension entre le camp 3 et le camp 4
Retour à la cruelle réalité, descendre vers les cordes fixes, puis retour vers le camp. En 5 heures, nous revenons vers nos tentes.
Je passe la soirée à scruter le haut des cordes fixes, j’attends le retour de Bruno, l’autre guide et de Nicolas. Vers minuit, deux pantins marqués par 20 heures d’effort, les yeux remplis d’un bonheur, que je jalouse secrètement prenent places dans nos tentes. Ils trempent leurs lèvres dans le thé que je leur aie préparé et s’endorment.
Une nuit courte, un matin froid, – 35°, et trois heures d’effort nous permettent de plier notre camp et d’entreprendre la descente vers le camp de base. Une longue journée de descente propulsée par les pulkas, finit de puiser les dernières forces de chacun.
Arrivée tardive au camp de base. Je demande un vol pour le soir même, la réponse est négative. Nous remontons un camp, non sans un certain stress, la météo annonce, dès demain, une belle dépression ! C’est nous qui allons en faire une, si l’on doit rester 6 jours sous tente, coincés sans pouvoir voler sur Talkeetna… Engagement, quand tu nous tiens !!!!
Le lendemain matin, le soleil est encore là. Merci ! Un vol à 10h00 nous dépose sur le tarmac de Talkeetna 45 minutes plus tard. Le dernier vol de cette journée a eu lieu vers 13h00, après les gens ont été bloqués 6 jours…
La fuite vers la vallée, vers les douches… Vers les repas non lyophilisés, vers les muffins du Humpy’s bar, vers les plats de saumon ou de halibut grillés, bref vers un confort de vie plus prononcé nous a bien réussi. Nous reprenons les kilos perdus.
Depuis Anchorage, je me suis rendu à Valdez, Mecque du ski héliporté, puis vers Seward. Rencontre avec des orques, des baleines, des phoques, des mooses et des ours, plus tard dans mon voyage.
L’Alaska est un joyau de la nature. Je peux déjà vous dire que vous aurez un second épisode écrit lors de ces prochaines années.
L’équipe de l’ascension de 2009