En Cordillère Blanche, notre ascension de l’Artesonraju (6’025m) est interrompue par un sauvetage en montagne au Pérou. Trois jeunes aspirants guides sont introuvables depuis plusieurs jours. Avec Amélie, nous participons à cette mission émouvante et risquée.

Une ascension interrompue par un appel à l’aide
Depuis le 12 mai, nous sommes au Pérou pour explorer la Cordillère Blanche. Le 4 juin, nous envisageons de gravir l’Artesonraju (6’025m), cette montagne emblématique rendue célèbre par Paramount.
Cependant, la nuit avant notre départ, un groupe bruyant d’une quinzaine de personnes débarque soudainement pour installer un camp de base. Impossible de dormir avec tout ce raffut. En allant voir ce qu’il se passe, un responsable nous informe que trois jeunes aspirants guides péruviens sont portés disparus depuis cinq jours, après une tentative d’ascension dans des conditions météo défavorables.
Un sauvetage en montagne au Pérou : solidarité et engagement
Avec Amélie, en fin de cursus de médecine, et moi-même guide de montagne, tous deux membre de la colonne de secours en Suisse, nous proposons notre aide. De plus, notre bonne acclimatation est un atout pour cet engagement.
Le responsable du sauvetage accepte volontiers notre aide. L’équipe est composée de guides locaux, porteurs, volontaires ainsi que des célèbres frères Pou. Ils ont déjà marché six heures le jour avant depuis Cashapampa avec des ânes pour transporter le matériel.

Une recherche périlleuse sur le glacier de l’Artesonraju
Le lendemain, nous partons du camp de base situé à 4’150 mètres pour commencer la recherche sur la partie basse du glacier, entre 5 000 et 5 300 mètres. Afin d’être plus rapides, nous montons « légers », tandis que les porteurs montent les charges lourdes.
Le glacier est un véritable champ de mines : séracs menaçants, crevasses profondes et ponts de neige instables. La dangerosité est évidente et la recherche complexe. Cinq cordées s’éparpillent sur le glacier dans différentes directions, sans trouver la moindre trace.
Par ailleurs, nous utilisons un drone pour couvrir une zone plus vaste, mais il ne peut pas sonder en profondeur les crevasses. De plus, malgré la taille modeste du glacier, localiser les jeunes disparus reste quasiment impossible. Heureusement, la météo est au beau fixe.

Un sauvetage triste, touchant et émotionnel
Cette opération de secours est à la fois triste et profondément humaine. La plupart des sauveteurs connaissaient personnellement les trois jeunes disparus, rendant chaque instant chargé d’émotions.
Après une longue journée harassante, sans succès, nous regagnons le camp de base fatigués. Le lendemain, d’autres cordées prennent le relais en explorant la partie haute du glacier. Pour notre part, la fatigue accumulée ces derniers jours nous contraint à redescendre sur Huaraz.
Les difficultés du secours aérien au Pérou
Dès le début, les sauveteurs avaient demandé l’appui d’un hélicoptère militaire. Celui-ci n’est arrivé que six jours après la disparition.
Le survol est difficile, l’altitude élevée et le terrain technique compliquent la tâche des pilotes peu expérimentés dans ce type de missions. L’hélicoptère ne peut pas se poser ni décoller facilement, limitant grandement son utilité.
Ce que ce sauvetage nous apprend sur les secours en montagne
Cette expérience nous rappelle à quel point nous avons un véritable luxe dans les Alpes : des secours professionnels, performants et bien équipés. Cependant, il est essentiel de les utiliser à bon escient. Chaque mission, qu’elle soit terrestre ou héliportée, expose les sauveteurs à des risques. C’est pourquoi le respect, la prudence et la préparation restent nos meilleurs alliés en montagne.
Par exemple, en Valais durant la haute saison, jusqu’à 20 hélicoptères de secours peuvent être mobilisés.
Au Pérou, ce sauvetage en montagne rappelle les opérations des années 1950-60 dans les Alpes, quand les secours reposaient sur les guides, les gendarmes et les volontaires locaux, souvent avec des moyens rudimentaires et terrestres.
L’engagement et le charme des montagnes reculées
C’est précisément ce manque d’infrastructures et cette rudesse qui font le charme et le danger de la montagne dans des régions reculées comme la Cordillère Blanche ou la Patagonie.
Par exemple, en Patagonie, il n’y a ni ânes ni mules pour transporter le matériel. Par conséquent, tout doit être porté à la main, ce qui rend l’effort encore plus intense. Tout repose sur la force humaine, rendant chaque expédition un vrai défi d’engagement et de responsabilité.
Une pensée pour les familles des disparus
Nous souhaitons adresser nos pensées les plus sincères aux familles des trois jeunes aspirants guides disparus. Cette expérience, aussi triste soit-elle, rappelle avant tout l’importance du respect de la montagne et, surtout, celle de la solidarité entre alpinistes.
