Avec plus de trente ans de métier, j’ai tissé des liens avec plusieurs de mes clients. Beaucoup sont restés fidèles à notre cordée. Mais deux d’entre eux me suivent depuis si longtemps. Alain G. rencontré en 1993 et devenu mon ami et client dès cette date. Et surtout Bernard G. qui, dès le début des années 2000 est devenu un ami, un compagnon de cordée incroyablement dévoué et un moteur dans mon activité. J’en veux pour preuve :
Notre première sortie avec Bernard remonte à mi-mars 2002. L’Aiguille d’Argentière par le glacier du Milieu. Un premier contact qui, nous ne le savions pas encore, allait nous ouvrir les portes de projets tous plus motivants les uns des autres. Bernard est devenu un second de cordée incroyable et si j’ose l’écrire, « sage » !
Passionné, je m’en suis très vite rendu compte… Les second et troisième engagements, nous déposent sur l’arête Kufner du Maudit et la Dent Blanche ! Il découvre les piolets tractions au passage de la rimaye pour rejoindre La Fourche !
» Bernard, tu tiens les piolets de cette façon et tu fais comme moi ! «
C’est un sportif confirmé. Il pratique assidûment du vélo de route. Cette base physique a toujours été un atout incroyable dans sa carrière alpine, andine ou himalayenne. Jamais nos journées furent trop longues, trop dures ou hors de portée, il a toujours rempli un rôle puissamment fidèle d’un second de cordée inaltérable.
Alors que passablement de ces journées se sont étalées sur plus de 15 heures d’effort, tels que le 19 mai 2009 pour rejoindre le sommet du Denali, ou encore lors de notre ascension de l’Innominata en versant sud du Mont-Blanc, Bernard a toujours su trouver en lui la force et la motivation de terminer nos projets.
Souvent, tout juste rentré, il me charge de trouver les prochaines destinations !
Prestement il laisse traîner derrière lui, la poudre qui mettra le feu et l’envie de participer à ses aventures. Bertrand, son fils aîné est souvent avec nous dans les belles ascensions. Philippe, mon collègue, partage sa cordée avec lui. Didier son ami de longue date deviendra vite le second moteur des projets en tous genre…
C’est bien connu, les cyclistes roulent en peloton, ils s’entraident s’ils font partie de la même équipe ! Le passé et le présent de cycliste que Bernard vit, fera, dès les premières années de montagne, des émules ! Ses amis cyclistes deviennent rapidement des amis de cordée. Il ameute ces derniers pour créer un groupe de ski de randonnée. Rapidement nous rayonnons dans les Alpes au gré des conditions d’enneigement.
Une haute route peu classique, une semaine au Val Maira, à Maljasset, à Bivio j’en passe et des meilleurs. Jamais une saison sans partager avec ses proches une semaine incroyable. Cependant, en rentrant de notre virée en Alaska, Bernard me glisse à l’oreille qu’ils, lui et son acolyte Didier, aimeraient repartir sur un projet ! Discussions certes mais ultra rapide, comme à leurs habitudes. Nous pesons le pour et le contre en 3 secondes et 20 centièmes…. La traversée des Alpes et plus tard une tentative de sommet népalais.
La Traversée des Alpes en ski d’Est en Ouest nous aura pris quelques saisons hivernales. Mais ce projet fût l’un des plus incroyables à partager. Merci Bernard et Didier. La suite de l’histoire de notre cordée ne fait que de s’accélérer. Un voyage au Népal puis des séries de courses magnifiques dans les Alpes : La face nord du Mönch, la Cresta Signal à deux reprises, la traversée du Sirac celle de l’Olan, l’éperon nord de la Pointe d’Amont, des Rotgrat(s) valaisannes ou encore la très belle arête nord-est de la Glière, que je découvre avec lui pour la première fois. Souvent Bernard sera mon second de cordée pour ; « aller voir comment c’est »
Les années suivantes nous trouvent en Argentine et au Chili à deux reprises pour skier, cela avec ses fidèles amis. La Sibérie et ses mètres de neige ou encore le Kirghistan en vallée d’Akk-Su sont tous des lieux que je découvre grâce à sa motivation incurable et surtout à la confiance que nous avons l’un en l’autre.
Cette confiance justement ! Elle est née grâce aux heures de partages, aux regards et aux décisions prises ensemble, ainsi que nos déboires et de nos frêles réussites. Et c’est ce point là qui est à mes yeux, la base d’une relation entre le guide de montagne et son (ses) client(s). Pour réussir tous ces projets, j’avais et j’ai besoin d’avoir confiance en mon second en tous points de vue. Pour lui c’est du même registre ! Et cette fidélité se construit au long des saisons. Peu ou pas de résiliation de contrat entre nous ! Il honore ses engagements et j’assume celui de la cordée dans le terrain. Ce n’est qu’à cette relation de confiance absolue que nous devons notre histoire.
L’immuabilité d’une cordée dans la relation avec son guide ou son client est réellement enrichissante et « payante » pour tous !
Notre histoire de cordée n’est pas terminée, je le souhaite vraiment ! Des projets sont déjà en préparation. Je dois rester éveillé sur le genre de sorties qu’il aime faire. Merci, car cela ne me permets de me reposer sur mes lauriers.
Merci Bernard pour tous ces partages.